Dans un monde en mutation constante, où aujourd’hui ne ressemble pas à hier et sera différent de demain, multiplier les angles d’approche pour comprendre la société s’avère plus que nécessaire. C’est tout l’enjeu de l’observatoire Keoscopie, qui réalise depuis plus de dix ans des études prospectives et innovantes pour décrypter les modes de vie du présent et imaginer la mobilité de demain, en lien avec les collectivités territoriales.
Pourquoi une étude sur l’Agglo du Pays de Dreux ?
Keolis, le partenaire de l’Agglo du Pays de Dreux pour la compétence transports, a réalisé une étude spécifique sur notre territoire pour en comprendre les usages, prendre en compte ses enjeux spécifiques et répondre au mieux aux attentes des habitants sur les questions de transports et de mobilité.
Éric Chareyron et Martin Roman, de la Direction de la Prospective Modes de Vies et Mobilités pour le Groupe Keolis ont supervisé cette étude. Le mardi 5 décembre 2023, en présence d’Estelle Bouton, directrice régionale Nord-Ouest de Keolis et de Jean-François Beaurain, Directeur Keolis pour le Drouais, ils en ont présenté les résultats, devant un public de techniciens et d’élus du territoire.
Une étude objective
L’observatoire Keoscopie s’appuie sur les apports de la sociologie et de l’ethnologie pour proposer des angles d’approche croisés permettant un regard objectif sur la société et donc des réponses adaptées aux besoins soulevés. L’étude est réalisée sous la forme d’un accompagnement qui permet aux usagers d’être en confiance et de répondre en toute objectivité. Des observations sont menées, mais aussi des enquêtes représentatives et des réunions de groupe.
Cette étude permet donc de ne pas se focaliser uniquement sur le visible et de lutter contre certaines idées reçues. Comme celle de considérer, par exemple, que la majorité du trafic urbain se fait en heure de pointe, c’est-à-dire entre 7 heures et 9 heures du matin et entre 16 heures et 18 heures trente, alors que seul un tiers des trajets sont effectués à ces horaires. Elle nous informe également sur certaines réalités mises en lumière par des données concrètes.
Ainsi, nous apprenons qu’à Dreux, un ménage sur cinq ne possède pas de voiture et que c’est également le cas de 12% des habitants de l’Agglo du Pays de Dreux. Comment permettre alors à ces habitants d’être intégrés dans la vie de la cité sans avoir de voiture ? Comment penser des modes de mobilité, tels que la marche, le vélo, les transports en commun, pour leur permettre de se déplacer mais aussi pour aider ceux qui possèdent un véhicule à changer de comportement et à être moins dépendants de leur voiture ? Comment, par la même occasion, permettre aux habitants des villages de se passer d’une seconde voiture, également un enjeu fort ?
Une complexité à prendre en compte
L’étude révèle une véritable complexité du monde de la mobilité pour l’usager et fait prendre conscience de la nécessité de sortir de l’expertise pour se mettre à sa hauteur. L’appellation des arrêts de bus, l’affichage des horaires ou la généralisation des démarches via un smartphone, doivent être pensés à travers le prisme de l’habitant. Les informations liées aux transports doivent être compréhensibles de tous.
Une société diversifiée et des modes de vie différents
La question de la mobilité, des transports, ne concerne pas qu’une seule partie de la population. Les services de transports sont souvent organisés pour tenir compte de la population active. Or, l’étude révèle que seul un trajet sur cinq concerne un déplacement dédié au travail. Il apparaît donc essentiel de penser aux déplacements hors obligations pour le travail ou en dehors des horaires de cours des collégiens et lycéens. Le service public de transport doit s’adapter aux besoins véritables du public.
De plus, les jeunes considèrent encore aujourd’hui le permis de conduire comme un sésame indispensable et idéalisent l’habitat individuel auquel 70% d’entre eux aspirent. L’enjeu est donc de taille : Comment faire en sorte que les jeunes intègrent que d’autres modalités de transports existent ? Comment ne pas les décevoir dans leur usage des transports en commun pour que la voiture devienne un mode de déplacement secondaire ?
Enfin, lorsqu’il est question de mobilité, il est habituel de raisonner en flux. Afin d’éviter les biais d’interprétation, l’enquête invite à penser davantage en nombre de bénéficiaires différents ayant utilisés le service au moins une fois au cours d’une période donnée. Dans notre société, les modes de vie sont de plus en plus irréguliers notamment en raison de la fluctuation des horaires de travail. Les voyageurs occasionnels sur les lignes de transport sont, de ce fait, aussi nombreux que les voyageurs réguliers et des solutions pour répondre à ce besoin de transport tout au long de la journée doivent être proposées.
S’adapter aux fragilités invisibles
Tenir compte des fragilités de la population est également fondamental en matière d’offre de transports. Si une meilleure prise en compte des handicaps visibles s’observe aujourd’hui, de nombreuses fragilités invisibles nécessitent d’être également considérées : lombalgie, troubles de l’audition, de la vue, arthrose, maladies cardiaques, diabètes, traitements liés à une maladie grave…
Les territoires doivent aujourd’hui révolutionner leur approche pour être plus inclusifs. La question de l’aménagement est alors essentielle : Comment permettre aux habitants de s’approprier la ville en marchant, la marche étant essentielle pour la santé physique et mentale, et en offrant aussi des assises et des oasis urbaines favorisant le repos ? Comment redonner confiance en l’espace public, pour que des enfants, des adolescents, des femmes ou des personnes âgées puissent se déplacer seuls, en toute sécurité ?
Quelle mobilité vertueuse pour notre territoire ?
Il s’agit d’une question essentielle. En 50 ans, le nombre d’habitants des communes de l’Agglo du Pays de Dreux a doublé alors que la population de la ville de Dreux est restée la même. Ainsi, comment favoriser une cohésion sur l’ensemble du territoire ?
Développer des solutions de transport à la demande, dépasser la question du territoire et de ses frontières pour raisonner en termes de bassin de vie, réfléchir à l’utilisation de la voiture en mode partagé et en proposant des solutions de covoiturage innovantes, penser le territoire pour la marche et le vélo, sont autant de réponses qui pourraient être apportées, en procédant étape par étape. La question de la mobilité suppose une réflexion multipliant les points de vue et doit être partie intégrante de la réflexion sur l’aménagement et l’urbanisme.
En conclusion
Gérard Sourisseau, Président de l’Agglo du Pays de Dreux et Frédéric Giroux, Vice-président en charge des Mobilités, ont rappelé l’engagement de l’Agglo du Pays de Dreux en matière de sobriété foncière, une démarche vertueuse visant à penser le développement du territoire dans une dynamique respectueuse de l’environnement. Ils ont souligné l’intérêt d’une telle étude, qui soulève les questions d’équité de la mobilité et met en lumière les fragilités à prendre en compte dans l’évolution de l’offre de mobilité à l’échelle de notre agglomération, pour aujourd’hui et pour l’avenir. Estelle Bouton, directrice régionale Nord-Ouest de Keolis a rappelé l’importance du partenariat entre le Groupe Keolis et l’Agglo du Pays de Dreux dans la réflexion partagée entre les deux structures pour faire évoluer les offres en matière de mobilité.